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Le marché du lundi à Tourcoing, 1910, Huile sur toile de Carlos Buffin, Coll. C.H.L.

Tous les lundis et jeudis, jours de marché, les ménages modestes peuvent s’approvisionner en légumes de second choix à des prix intéressants. Des tentes de toile claire abritent les étals sur tréteaux. D’autres étals sont disposés à même le sol ou sur des charrettes.

Le bénédicité, Début 20ème siècle, Huile sur toile d’Alfred Desplanques, Coll. C.H.L.

La soupe est au menu de toutes les tables au 19ème siècle. Dans les familles bourgeoises et aristocratiques, on préfère aux soupes épaisses, des consommés, des potages, des veloutés, des crèmes et des bisques. A la différence des soupes épaisses du « pauvre », ces mets ne servent pas à rassasier mais à éveiller les papilles gustatives en début de repas.

Soupière et louche, Début 20ème siècle, Céramique et métal argenté, Coll. C.H.L.

Au 19ème siècle, la soupière se démocratise avec le développement industriel de la céramique bon marché. Elle est fortement concurrencée par la casserole en aluminium dans les années 1930 et la cocotte-minute à partir de 1953. Mais c’est surtout l’évolution de nos goûts et de nos pratiques alimentaires qui relèguent la soupière au rang des objets décoratifs, que l’on pose sur le buffet.

Jatte à crémer, 19ème siècle, Terre cuite vernissée, Coll. C.H.L.

La jatte à crémer, aussi appelée telle à lait, est un vaste récipient en céramique très évasé. On y laisse reposer le lait pour faire monter la crème.

Etouffoir à pomme de terre, Après 1885, Terre cuite vernissée, Manufacture de Bruyn, Coll. C.H.L.

L’étouffoir, très utilisé jusqu’au début du 20ème siècle, est une cloche qui sert à couvrir des pommes de terre cuites à l’étouffée. Une fois la cuisson terminée, on le retourne, il sert alors de saladier. Cet étouffoir a été fabriqué par la manufacture de Gustave de Bruyn. Ce céramiste nordiste est l’inventeur d’un procédé de vernissage sans plomb pour la poterie culinaire, breveté en 1885.

Que mange-t-on ?
Le panier de l'ouvrier
Faute de temps, de budget et de possibilité de stockage, le repas ordinaire de l’ouvrier au 19ème siècle est répétitif. Les produits de base qui le composent sont le pain, la soupe, la pomme de terre et le lait, dont la pauvreté nutritive est compensée par une consommation importante.

Du pain et de la soupe : pour caler l’estomac

Deux types de soupe figurent au menu quotidien de la classe populaire. La soupe réalisée à partir de légumes, achetés au marché ou cueillis au jardin, est consommée épaisse. Le bouillon est versé sur une tranche de pain et servi dans une écuelle. L’autre recette, très répandue, est un mélange de lait et de pain. Elle est appelée panade ou soupe au lait de beurre :

« Mettre les restes de pain dans une casserole contenant un litre d’eau froide. Saler, poivrer, faire bouillir. Retirer et broyer le pain. Ajouter une jatte ou deux de lait bouillant. Mélanger le tout. »


Le pain, en ville comme à la campagne, reste l’aliment essentiel, voire exclusif de tout repas. On estime qu’en moyenne, la consommation journalière par personne s’élève à 750 g dans le Nord. Les ouvriers le mangent en tartine. En ville, on ne le confectionne plus chez soi mais on l’achète à la boulangerie dont les enseignes se multiplient.

La qualité du pain apparaît comme un élément de clivage encore très important au 19ème siècle. Les classes populaires se procurent le pain « blanzé » qui tient sa couleur grise du seigle qu’il contient. Le pain blanc, composé de fleur de farine de première qualité, est consommé au quotidien par les plus riches et uniquement à l’occasion de grandes fêtes par les classes populaires.

La pomme de terre : le pain du pauvre

La pomme de terre, rapportée d’Amérique à la fin du 16ème siècle, est cultivée dès 1620 en Belgique. A Tourcoing, sa présence est attestée par un arrêt de 1734 imposant une taxe sur les récoltes. Elle est alors utilisée comme aliment pour le bétail ou consommée par les paysans comme un ersatz du blé en temps de disette. La campagne d’Antoine Parmentier à la fin du 18ème siècle en faveur de ce « nouveau pain du pauvre » contribue à en généraliser la culture en France et à en élargir la consommation à toutes les classes sociales.

Au 19ème siècle, la pomme de terre prend une place importante dans l’alimentation ouvrière. A Lille, en 1860, les besoins d’une famille de 6 personnes s’élèvent à 5 kg par jour. Les médecins déplorent le déséquilibre alimentaire provoqué par cette surconsommation mais c’est affaire de budget : 1 kg de pomme de terre coûte 1 à 3 sous, 1 kg de viande de bœuf de 27 à 37 sous. On mange la pomme de terre sous différentes formes : en purée, en soupe, en ragoût - le rata-, ou simplement avec la pelure assaisonnée de sel. Les fritures sont proscrites car la graisse coûte cher et on craint l’embrasement des bassines à frire.

Le lait et ses dérivés

Au troisième rang des aliments essentiels de l’alimentation ouvrière se trouve le lait. Il s’agit principalement du lait battu ou babeurre, un sous-produit de la fabrication du beurre. Cet aliment polyvalent est de faible prix : un demi-sou le litre. Quant au beurre et au fromage, ils sont consommés en petite quantité et sont souvent remplacés par du fromage blanc sur les tartines.

Le lait battu entre dans un large panel de recettes : en boisson rafraichissante, en soupe, en sauce blanche pour les légumes ou relevé de cassonade ou de poires cuites. La recette du lait battu à la tourquennoise consiste à faire cuire des morceaux de pommes et de pommes de terre dans du lait ayant reposé toute une nuit. Une fois cuite, la préparation est assaisonnée de cassonade et consommée avec des tartines.

« Voilà un repas qui coûte pas cher et qui est bon pour la santé et qui remplit bien l’estomac en hiver ».